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Flemme olympique : Moins haut, moins vite, moins fort

Méga Dossier de feignasse estivale

Flemme olympique : Moins haut, moins vite, moins fort

Étrange situation que celle de proposer un numéro d’été sur la flemme, pensé et lancé bien avant la dissolution de l’autre pelle à merde sociopathe, et qu’on est bien agité·es. Ceci dit, ce dossier n’est pas déconnecté des enjeux cruciaux du temps présent. Car dès les premières discussions, on se l’est dit : pas question de se contenter d’une incitation à la paresse (pourtant bienvenue). L’objectif ? Tenter d’asséner un uppercut à cette productivité forcée, affichée comme valeur cardinale du quotidien et qui nous bouffe par tous les pores. L’hypothèse (inconnue à l’heure où est écrite cette intro) d’un gouvernement de fafs décuplerait cette guerre aux gens pas comme il faut, aux galérien·nes, aux personnes exilées taffant au noir ou simplement à celles et ceux qui veulent vivre tranquillement dans leur coin sans qu’on leur impose un travail débile et une idéologie aliénante, accompagnés d’une bonne dose de culpabilité.

Un constat s’impose : l’accélération ultralibérale nous est passée dessus comme un train bondé de startupeurs décérébrés, et les espaces de fuite se raréfient. Finie l’époque où on revendiquait pépouze le volem rien foutre al pais (1). La tendance, c’est France Travail (famille, patrie), traque au temps libre et chasse aux improductif·ves. Qu’on soit chômeur·se ou retraité·e, il faut se battre et se justifier pour chaque centime perçu hors du turbin. Et quand on arrive enfin à se poser, on réalise que quasiment tous les espaces de nos vies, y compris ceux où on rêvasse, sont soumis à une injonction de rentabilité.

On pourrait se dire, cui cui c’est l’été, justement le moment où on peut enfin déconnecter. Mais entre celles qui triment et ceux qui bénéficient – encore – des congés payés, ceux qui s’auto-exploitent et celles qui font des burnout à répétition alors que les richoux font joujou avec les JO et leurs valeurs nauséabondes, et que, comme grosse cerise sur le gâteau, le fascisme tape bien fort à nos portes, on se dit, rire jaune, qu’au final on sort ce dossier au meilleur des moments. Youpi.

Dans les pages qui suivent, on vous parle aussi bien de « discrimination par le rythme » au fil des siècles avec l’historien Laurent Vidal que de traque aux chômeurs à Pôle emploi/France Travail, du rapport à l’« indolence » comme résistance dans les quartiers populaires de Marseille avec la photographe Yohanne Lamoulère, que d’un chanteur du fabuleux groupe Astéréotypie qui revendique l’application pour sa pomme du statut de « pacha ».

On s’y pose également la question du travail gratuit, des vacances « rentables » en ces temps d’instagrammisation du monde, et on va même jusqu’à revendiquer de meilleures conditions de travail pour les acteur·ices de téléréalité). Bref, malgré les nuages, on a tenté de vous offrir un peu de légèreté dans ces temps si pesants, tout en lançant des pistes vers une lutte qu’il ne faut pas lâcher : faire voler l’enclume du Travail dans la vitrine cradosse du capitalisme.

Dossier coordonné par Émilien Bernard et Pauline Laplace

(1) Référence au film du même nom de Pierre Carles, Christophe Coello et Stéphane Goxe, sorti en 2007, et dont le titre, dérivé de l’occitan, signifie « Nous voulons rien foutre au pays ».